Valère Novarina, de l'intérieur du mot
Je n’utilise pas les mots; je n’en ai jamais
cherché aucun. Ce ne sont pas des outils. Devant le langage, les sensations
sont de l’ordre du toucher : quelque chose parle là derrière l’oreille; on
ressent la matérialité de tout. Les mots sont comme des cailloux, les fragments
d’un minerai qu’il faut casser pour libérer leur respiration; tout un livre
peut provenir d’un seul mot brisé. Le mot est fermé, enveloppé, secret,
enfoui : quelque chose doit apparaître de dedans – de l’intérieur du mot
et pas du tout de l’intérieur de l’écrivain. Les mots en savent beaucoup plus
que nous - mais il faut le prendre avec amour entre ses mains et les
porter à son oreille. Les mots sont au sol, incompréhensibles et comme des noyaux.
Je les ramasse, j’écoute dedans ; je les brise : apparaît une phrase
une scène toute la construction respiratoire du livre.
Valère Novarina extrait Le débat avec
l’espace – P.O.L
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