René Guy Cadou, poésie
L'étrange douceur
Comme un oiseau dans la tête
Le sang s'est mis à chanter.
Des fleurs naissent, c'est peut-être
Que mon corps est enchanté,
Que je suis lumière et feuilles,
Le dormeur des porches bleus,
L'églantine que l'on cueille
Les soirs de juin quand il pleut
Dans la chambre un ruisseau coule,
Horloge au caillou d'argent,
On entend le blé qui roule
Vers les meules du couchant
L'air est plein de pailles fraîches,
De houblons et de sommeils.
Dans le ciel un enfant pêche
Les ablettes du soleil.
C'est le toit qui se soulève
Semant d'astres la maison.
Je me penche sur tes lèvres,
Premiers fruits de la saison.
"Hélène ou le règne végétal", 195
Bientôt l'arbre
Verdoyante fumée
Demain je serai l'arbre
Et pour les oiseaux froids
La cage fortunée
Les grandes migrations
Sont parties de ma bouche
De mes yeux pleins d'épis
Les éclairs de santé
Je te suis dans l'air bleu
Flèche douce à la paume
Bel arbre que j'éveille
Au bord de mes genoux
Tronc si blanc qu'il n'est plus
Qu'une neige attentive
.
Tu courbes vers le toit
Tes brandons de lumière
Ta sève jour et nuit
Chante dans les gouttières
.
On te fête déjà
Dans les rues de villages
Ainsi qu'une saison
Inconnue de la terre
Et toi dans les sillons
Sans borne où les perdrix
Gaspillent pour la joie
Des poignées de sel gris
Tu marches répondant
De la douceur des pierres.
La vie rêvée 91,92
René Guy Cadou Comme un oiseau dans la tête éditions
Points
Bio " René Guy Cadou 1920-1951 est l’un de nos plus grands
poètes. Une vie très brève, une volonté farouche de ne pas " monter à
Paris ", une poésie aux thématiques liées à la nature, à la fraternité et
à l'amour, mais aussi à la mort, un style poétique hors des modes ont marqué
ses contemporains. " :
Site officiel Hélène et René Guy Cadou
"Esprits Nomades" : La claire Fontaine de la poésie
Une page de toute beauté...
RépondreSupprimerRené Guy Cadou, un poète que j'aime beaucoup...
"Celui qui entre par hasard dans la demeure d'un poète
Ne sait pas que les meubles ont pouvoir sur lui
Que chaque nœud du bois renferme davantage
De cris d'oiseaux que tout le cœur de la forêt
II suffit qu'une lampe pose son cou de femme
A la tombée du soir contre un angle verni
Pour délivrer soudain mille peuples d'abeilles
Et l'odeur de pain frais des cerisiers fleuris
Car tel est le bonheur de cette solitude
Qu'une caresse toute plate de la main
Redonne à ces grands meubles noirs et taciturnes
La légèreté d'un arbre dans le matin."
Marie merci pour ce poème !
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